Je vis le jour le 12 décembre 1573 dans la petite ville de Blackmoor, en Angleterre. Je naquis sous le nom de Gabriel Crash Wolfgang Wellington, lord de la contrée de Blackmoor. Mes parents, le Duc et la Duchesse de ce domaine, y vivaient depuis toujours. Cela faisait des génération et des générations que les Wellington vivaient dans le manoir familial, qui se transmettait de père en fils. Ma mère était originaire quant à elle d'une ville voisine, elle aussi gouvernée par une riche famille : les McConnors. Dès leur plus jeune âge, les parents de mes parents s'étaient arrangés pour promettre leurs enfants l'un à l'autre. Cela peut vous choquer, mais il faut savoir qu'à cette époque c'était chose courante. Le problème était que souvent les deux personnes ne s'aimaient pas d'un amour fusionnel. Ce fut le cas pour mes parents. Mon père et ma mère s'appréciaient justes en simple amis, mais le destin en avait voulu autrement. La coutume voulait que les deux individus l'acceptent sans broncher, que la mère porte les enfants de son mari, et qu'ainsi la descendance soit assurée, tandis que le mari s'occupait des affaires du domaine. C'est dans ces mêmes conditions que je naquis.

Je fus le premier, et donc l'héritier mâle de la famille. L'année d'après naquit Annabelle, puis deux ans plus tard Lyssandre. Lorsque j'eus six ans, ma mère accoucha de son dernier enfant, Charles. Les conditions pour mettre au monde n'étaient pas aussi faciles que celle d'aujourd'hui, et les risques pour que l'enfant ou même la mère meurent en couche étaient beaucoup plus élevés. Même en ayant eut le meilleur médecin de la région, ma mère ne survécut pas à ce quatrième enfant. Ce fut donc une nourrice qui s'occupa de lui de mes deux sœurs. Etant l'héritier, ce fut mon père qui suivit mon éducation.

J'appris dès mon plus jeune âge à manier l'épée, monter à cheval, les mathématiques, l'astronomie, les règles de la religion... Bref tout ce que vous pouvez imaginer. Lorsque je fus plus âgé, je commençai à apprendre l'art de gérer son domaine économiquement, de régler les querelles entre les villageois, et aussi les us et coutumes du grand monde. Mon père se préparait à me faire entrer dans le monde des grands, à me présenter à l'aristocratie, et surement, déjà, à me trouver une parfaite épouse. J'avais à peine 12 ans, mais il fallait croire que ce genre de choses se régler beaucoup à l'avance.

Le jour de mes 18 ans, mon père m'emmena pour la première fois à Londres. Voir une grande ville avec toutes les modernités qu'il n'y avait pas à Blackmoor me fascinai. Et même encore aujourd'hui, je ressens toujours un petit pincement au cœur en visitant Londres. Nous étions invités à une fête organisée par la famille royale - mon père ayant quelques relations commerciales avec eux - qui durerait plusieurs jours. Les fêtes aristocratiques n'étaient pas nouvelles pour moi, mon père en organisant souvent dans notre château. Cependant, c'était la première fois que c'était chez des personnalités aussi influentes. Je dois dire que je me sentais plutôt nerveux, et assez maladroit. La malchance eut qu'une demoiselle passait à côté de moi au moment où je fis un mouvement brusque de la main. Celle-ci renversa son verre sur sa belle couleur corail. Je bafouai milles excuses, et me proposai de l'accompagner en cuisine pour essayer de faire partir la tâche. Sa robe devait coûtait très cher, et j'avais bien peur que jamais plus elle ne puisse la remettre. Alors que nous frottions énergiquement la tâche avec des serviettes et du savon, nous en vînmes à échanger nos identités. Elle s'appelait Elise, Marquise de Hidewest. Elle avait 15 ans, et c'était la première fois, elle aussi, qu'elle était conviée à une telle cérémonie.

Nous devînmes vite amis durant les quelques jours que nous passâmes ensemble. Je dois même avouer que je tombai petit à petit sous ses charmes. Elise était une jeune fille tout à fait charmante. Elle était de bonne famille, son père avait de l'argent, mais avant tout, c'était une personne cultivée et généreuse. Elle avait toujours le mot pour rire, le sourire facile. C'était la meilleure personne que j'eusse rencontré.

Mon père ne passa pas à côté des rapprochements entre Mademoiselle de Hidewest et moi. Son père non plus d'ailleurs. Il faut dire qu'ils devaient tous les deux chercher des bons partis pour marier leur progéniture, et que cette réception tombait à pic, car tous les hauts aristocrates y seraient. Mais je n'étais pas le seul à être tombé sous les charmes d'Elise. En effet, le Comte de Rochewood, de 10 ans mon ainé, n'y était pas non plus de marbre. Le Comte lui fit la cour durant plusieurs jours, et j'eus vraiment peur que son père -ou même elle- ne finisse par céder. Mais mon titre était plus honorifique que le sien, et c'est surement ce qui fit pencher la balance à mon avantage. Sans que mon père ne m'en dise mot, lui et le père d'Elise tombèrent sur un arrangement. Il m'annonça, la veille de rentrer à Blackmoor, que dans quelques mois auraient lieu mon mariage, et que se serait avec Elise. Je ne pouvais rêver mieux. Passer la fin de mes jours avec elle me combler de joie. J'attendis donc le mariage avec impatience.

Le mariage eut lieu sous le doux soleil de juin. Bientôt Elise devint Lady Wellington. Mon père nous offrit comme cadeau de mariage une grande demeure en bordure de Blackmoor. Les semaines, les mois passèrent, à une vitesse folle. Il faut croire que le temps passe vite quand on est heureux.

Lorsque les premières neiges arrivèrent, et que j'allais sur mes 19 ans, Elise m'annonça qu'elle était enceinte. Je crois que jamais je ne fus aussi euphorique. Mais il faut croire que le bonheur ne dure jamais.

Après l'hiver se succéda le printemps. Elise était alors enceinte de 7 mois. Elle avait à peine 16 ans, et était assez faible de nature. Il fallait donc qu'elle soit sous surveillance, au cas où elle tombait malade. Elle passait à présent la plupart de son temps dans notre chambre, allongée sur le lit. Son activité favorite était le tricot. Elle préparait des vêtements pour le futur bébé, et en était déjà à une belle garde-robe. De mon côté, les semailles me prenaient la plupart de mon temps. Je devais aller surveiller avec mon père que les villageois s'occupaient bien des terres, et s'ils avaient assez de graines.

Un soir je dus rester à Blackmoor pour régler une histoire de dettes. Je rentrai tard le soir. Lorsque j'arrivai à hauteur de la maison, je remarquai des silhouettes inhabituelles devant la maison. Plus je me rapprochais, plus elles prenaient des allures humaines. Il s'avéra que c'était les corps des deux jardiniers. La panique monta en moi. Où était Elise ? Allait-elle bien ? Je courrai à travers toute la maison, passant à côté d'autres cadavres de domestiques. J'entendais encore à l'étage des cris de peur. Le criminel était encore dans la maison ? Je me munissais d'un sabre qui pendait au mur, en guise d'arme. Il n'y avait aucun bruit dans notre chambre. J'ouvrai la porte lentement. Le spectacle qu'il y avait à l'intérieur était indescriptible. Au dessus d'Elise se trouvait le Comte de Rochewood. Que faisait-il ici ? Du sang se trouvait autour de sa bouche et sur ses vêtements. Je ne comprenais pas. Je menaçai le Comte de mon arme, et lui ordonnai de reculer. Il n'esquissa pas un mouvement, se contentant de me regarder avec un sourire provoquant. Il me défia d'approcher, et me dit que je ne pouvais plus rien pour ma femme, qu'elle était morte, et qu'il était repu de son sang. Les larmes me montaient aux yeux, bien que je me forçai pour ne pas le croire. Mais elle semblait si pâle, si inerte... Et puis il y avait les cadavres des domestiques... Le Comte vint vers moi, me soulevant du sol et me plaquant contre le mur. Si rapide que je n'eus pas le temps de le voir. Il me soulevait comme si je ne pesais rien. Qu'est-ce qu'il était ? Le Comte me répondit qu'il était une créature de la nuit, une créature plus puissante que n'importe laquelle au monde, et que jamais je n'aurais du lui prendre ce qu'il lui appartenait. Il avait aimé Elise au premier regard, et la voir partir avec un autre, un vulgaire humain l'avait anéanti. Depuis il aspirait à la vengeance, et avait attendu le moment propice, celui où je ne me douterais de rien, et où cela me ferait le plus souffrir. Car le Comte n'avait pas l'intention de me tuer, bien au contraire. Il voulait que je comprenne ce que signifiait perdre la femme que l'on aime et devoir vivre avec son absence. Sur ces mots, et avec un rire malsain, il quitta les lieux. Trop rapidement pour que je ne le suive des yeux.

La perte d'Elise et de notre enfant m'anéantit. J'avais perdu tout ce qui compter le plus au monde. L'envie de me tuer était immense. Mais je ne pouvais pas. Il fallait que je venge leur mort, que je tue ce Comte. Mais avant cela, il fallait que je sache ce qu'il était. Pendant des mois je passais mon temps dans les livres, cherchant ce qu'il pouvait être. J'abandonnai mes obligatoires de Lord, délaissé mon père et le domaine. Mon père en fut anéanti à son tour. Deux mois plus tard il mourrai brutalement. J'aurais du être son successeur, mais je n'en avais plus aucune envie. A vrai dire je n'avais plus envie de rien. La perte d'Elise m'avait fait perdre le gout à la vie, celle ci paraissant si plate et sombre sans elle à mes côtés.

Je découvris que le Comte était un vampire. Je n'avais jamais cru à ces histoires, mais de toute évidence, il fallait bien s'y faire. Je fis plusieurs voyages, parlant à des personnes susceptibles de me renseigner. Annabelle, qui s'était mariée avant la mort de mon père, reprit avec son mari le domaine. Elle compatissait à la mort d'Elise, et, même si elle ne croyait pas aux histoires de vampires, m'aidait financièrement dans mes recherches. J'avais beau avoir vendu ma maison, l'argent partait vite. Un homme m'apprit qu'il avait combattu plusieurs vampires dans sa vie, et il m'expliqua comment faire. Bientôt je rencontrai mon premier vampire. Ce n'était pas le Comte, car celui-ci, après son meurtre, semblait s'être évaporé. C'était un vampire que chassait depuis plusieurs mois l'homme qui m'avait renseigné. Il m'avait proposé de l'accompagner, car après tout, comme il disait, on en apprenait bien plus sur le terrain qu'en lisant tous les livres du monde. Le vampire était un fillette de sept ans en apparence. Je pris Harry -l'homme qui m'aidait- pour un fou. Comment une fillette pouvait être aussi malveillante ? Je dois avouer que quand je la vis se jeter sur un mendiant, au loin, je changeai d'avis. Nous la tuâmes en lui enfonçant un pieu dans le cœur, puis en la brûlant. Cette expérience me traumatisa pendant plusieurs semaines, mais la vengeance reprit bientôt le dessus.

Harry et moi parcourûmes ensemble le monde, à la recherche d'autres vampires. A chaque fois que nous en attrapions un, j'avais l'espoir que celui ci puisse me révéler la cachette du Comte. Mais ce fut, à ce niveau, à chaque fois un échec. Les années passèrent. Je n'étais plus intéressé que par la chasse aux vampires, le monde extérieur ne m'intéressait plus.

C'est lors d'une chasse que ma vie bascula pour la seconde fois. J'avais 24 ans. Harry avait repéré un humain aux comportements étranges. Nous l'avions suivi plusieurs jours, et pensions qu'il s'agissait d'un vampire. Un soir de pleine lune, nous avions décidé de l'attaquer. Sauf que le plan ne se déroula pas comme prévu. Lorsqu'on lui planta un pieu en bois dans le corps, l'homme perdit simplement perdu du sang, et sembla plus enragé que paralysé. Les nuages découvrirent alors la lune, et alors il se passa l'impensable. L'homme se transforma en une sorte de gros loups sur deux pattes, et attaqua Harry. Il le décapita d'un coup de crocs. Alors que le loup-garou fondait sur moi, je le repoussai avec un de mes petits coutelas. L'argent sembla le brûler. Entre temps, il essaya de me tuer, mais un nouveau coup de couteau le fit dévier de sa trajectoire. Ainsi il me mordit l'épaule plutôt que mon cou, puis la douleur le fit se dégager, et il disparut dans la pénombre.

Blessé, je regagnai la chambre d'hôtel que je partageai avec le défunt Harry. Je passai une semaine cloué au lit, la fièvre me faisait délirer. Je crus que j'allais mourir avant d'avoir venger Elise, et cette idée me révolta. Alors je luttai, et ma santé s'améliora. Pendant plusieurs semaines, l'homme-loup m'intrigua. Je me plongeai à nouveau dans les livres. Loup-garou, lycanthrope. Voilà ce qui m'avait attaqué. On pouvait les tuer avec de l'argent, d'où le pourquoi mon couteau l'avait fait fuir, alors que le bois l'avait juste égratigné.

Le premier soir de pleine lune depuis l'attaque du loup-garou, je me sentis bizarre. Étrangement excité, violent aussi. Très lunatique. Je compris tout de suite la raison d'un tel comportement quand je me retrouvai transformer, à mon tour, en lycanthrope. Visiblement, la morsure m'avait contaminé. Je n'eus pas le temps d'avoir peur, car bien vite vint l'instinct animal. Un instinct incontrôlable, meurtrier, totalement dangereux. Ne contrôlant plus rien, je passai la nuit a tué des passants dans les rues, sans trop me rendre compte. Ce n'est qu'au petit matin, quand je me réveillai à moitié nu et couvert de sang dans la forêt avoisinante que je me souvins de l'horreur de la veille. J'avais d'abord cru à un cauchemar, mais il fallait croire que c'était réel.

Horrifié, je fis mes bagages et rentrai chez moi, à Blackmoor. Ma sœur fut surprise de me voir, mais elle m'accueillit à bras ouverts. J'eus peur de lui faire du mal la nuit qui précéda celle de la pleine lune. Mais je ne me transformai pas. Je découvris vite que cela n'arrivait qu'à la pleine lune. Essayer d'en apprendre plus sur les lycanthropes me fit mettre de côté la chasse aux vampires. Il faut dire que les soirs de pleine lune, j'étais tellement incontrôlables que je tuais systématiquement. J'avais beau partir dans des endroits reculés, il y avait toujours des humains à proximité.

Ce phénomène répété mit 50 ans avant qu'enfin je puisse me contrôler sous forme de lycan. Entre temps, j'avais quitté Blackmoor définitivement, et radicalement. Les années passaient, et je ne prenais aucune ride. A la longue cela paraissait très étrange, et personne ne devait savoir la vérité. J'étais donc parti m'installer en Ecosse, dans une région reculée où peut d'humains vivaient. J'avais été employé par un menuisier pour subvenir à mes besoins. Je n'étais plus Lord Gabriel Wellington, mais Gabriel Wellington tout court. J'avais préféré renoncer à mon titre, pour ne pas attirer les soupçons.

Je passai environ 5 ans dans chaque village, voir moins. Si je restais plus longtemps, les gens commençait à se poser des questions. Il était dur de vivre tout le temps dans le secret. Les femmes venaient à moi, essayaient de me séduire. Mais elles rencontraient un bloc de glace. Je ne pouvais pas, Elise était encore trop présente dans mon âme. Mais je ne pouvais pas expliquer toute cette histoire aux autres villageois, car ils auraient poser trop de questions. C'est pourquoi je ne les côtoyais presque jamais. Les gens me voyaient comme l'étranger mystérieux, mais qui au fond n'était pas bien méchant. Ils devinaient un problème, un évènement tragique dans ma vie, mais le gardaient pour eux. C'était mieux ainsi.

Lorsque j'eus assez d'expérience pour me contrôler une fois transformé, je pus reprendre la chasse aux vampires. Ma condition de loup-garou s'avéra bien vite être un avantage de taille. Généralement j'attaquais une fois transformé pour être plus fort, et donc que le risque pour que j'y laisse ma peau soit plus faible.

1914 finit par arriver, avec la première guerre. Je fus recensé sous le nom de Wolfgang Wellington, descendant de Gabriel. Je passai donc inaperçu. Je revins sans une égratignure de la guerre, ce qui était considéré comme un miracle. Mais dès que je me prenais une balle ennemie, je guérissais dans les minutes qui suivaient. Je devins vite un héros de cette guerre contre mon grès. Je partis à la fin de la guerre en France, par raison d'anonymat. En 1939, ce fut le début de la seconde guerre mondiale, et le cauchemar recommença. Jusqu'en 1945, la chasse fut mise en pause. Après la guerre, ce fut en Amérique que je partis, vers le nouveau continent. Je me fis renommé Crash Wellington pour l'occasion.

Comme pendant toutes les années auparavant, je me concentrais sur les vampires, et le Comte. D'ailleurs, si il était encore en vie, il ne devait surement plus s'appeler comme ça. Sa trace avait donc définitivement disparue avec les années, et cela m'anéanti. Cependant, j'avais toute l'éternité pour le traquer. Je persévérai donc.

Je devins chasseur de primes, car vu que je maniai les armes depuis longtemps, j'avais de l'expérience. En plus, le fait de rechercher, traquer les gens ne m'étaient pas inconnus. C'était le même stratagème qu'avec les vampires. Et puis qui sait, peut-être que cela favoriserait ma recherche du Comte.

2010. Sur la trace d'un vampire, je me retrouvai à Bodie. Ma voiture m'avait lâché alors que j'étais dans le centre-ville. Mystérieusement. Impossible de la faire redémarrer. J'avais donc pris mon sac de voyage, contenant des affaires, de la nourriture, et surtout des armes, et m'était lancé dans la quête d'un garagiste, ou quelque chose du genre.

Et c'est comme ça que tout commença.